Shawqi Abdul Amir De l’Orient à l’Occident : le voyage vers une civilisation du dialogue

Il est des hommes dont la vie ne se résume pas à un parcours, mais à un passage. Shawqi Abdul Amir appartient à cette lignée rare d’intellectuels qui ont su transformer leur itinéraire personnel en symbole d’un dialogue vivant entre l’Orient et l’Occident.

Shawqi Abdul Amir  De l’Orient à l’Occident : le voyage vers une civilisation du dialogue

Par Ali Al-Hussien – PO4OR, Paris


Introduction : un poète diplomate, miroir entre deux mondes

Il est des hommes dont la vie ne se résume pas à un parcours, mais à un passage.
Shawqi Abdul Amir appartient à cette lignée rare d’intellectuels qui ont su transformer leur itinéraire personnel en symbole d’un dialogue vivant entre l’Orient et l’Occident.
Poète, diplomate, pédagogue et désormais directeur général de l’Institut du Monde Arabe à Paris, il incarne la synthèse d’une double appartenance : celle d’un Orient enraciné et d’un Occident ouvert.

Né à Al-Nasiriyah, au sud de l’Irak, en 1949, Shawqi Abdul Amir grandit dans la lumière de la civilisation sumérienne, là où les mots furent les premiers outils de l’humanité.
Ce lien avec l’origine du langage allait marquer toute sa vie.


De la Mésopotamie à la Sorbonne : la genèse d’un pont

Très tôt, il quitte son Irak natal pour poursuivre ses études à Paris, où il obtient un master en littérature comparée à la Sorbonne en 1974.
Là, entre la rigueur académique française et la mémoire poétique de l’Orient, il forge sa vision :

« La culture n’est pas une frontière. C’est une respiration commune. »

Dans les années suivantes, il enseigne, écrit, traduit et voyage entre Alger, Beyrouth, Sanaa, Paris et Doha.
Partout, il porte la conviction que la culture arabe ne doit pas être défendue comme une relique, mais vécue comme une force active, moderne, et universelle.


Le diplomate de la culture

Avant d’être nommé à la tête de l’Institut du Monde Arabe (IMA) en 2024, Shawqi Abdul Amir fut l’un des artisans du dialogue interculturel à travers ses fonctions diplomatiques et ses initiatives éditoriales.
On lui doit notamment le projet « Un Livre dans un Journal », qui a permis à des millions de lecteurs dans le monde arabe de découvrir la littérature sous un format populaire et novateur.
Cette idée simple – rapprocher le livre du quotidien – résume sa philosophie : rendre la culture accessible sans la dévaluer.


L’Institut du Monde Arabe : un nouveau souffle

Depuis son arrivée à la direction de l’IMA, Shawqi Abdul Amir s’est fixé un objectif clair :

« Faire de l’Institut un lieu de vie, pas de nostalgie. »

Sous son impulsion, l’IMA redevient un espace dynamique de création, de recherche et d’échange.
Les expositions sur la jeunesse arabe, la poésie contemporaine, ou les grandes civilisations du Levant résonnent désormais avec la société française d’aujourd’hui.
Les partenariats se multiplient : du Golfe à la Méditerranée, du Maghreb à Paris.
C’est une diplomatie culturelle douce, mais puissante – celle des idées, des mots et des images.


L’art du dialogue : entre respect et audace

Chez lui, la culture n’est jamais un outil de pouvoir, mais un langage d’égalité.
Il croit à l’échange des imaginaires, pas à l’imposition des modèles.
Sous sa plume et dans ses discours, l’Orient n’est plus un décor exotique, mais une source de modernité.
Et l’Occident n’est plus un juge, mais un partenaire.

Dans ses entretiens, il rappelle souvent que l’identité n’est pas un mur, mais un fleuve :
elle se nourrit de ce qu’elle traverse.
C’est pourquoi il milite pour une approche du monde arabe débarrassée des clichés :
ni victime, ni conquérant, mais acteur conscient d’une mondialisation culturelle qu’il peut enrichir.


L’homme des deux langages : le poète et le diplomate

« Le diplomate et le poète travaillent dans le même champ : celui du langage, » aime-t-il dire.
Le premier cherche l’équilibre, le second la vérité.
Et Shawqi Abdul Amir est les deux.

Ses poèmes – de Les pierres détestent le silence à La maison et l’exil – portent la trace d’un homme qui vit entre deux lumières.
Sa poésie est une géographie : celle du déplacement, de la mémoire, du retour impossible et du rêve toujours recommencé.
Ses mots relient le Tigre à la Seine, la date du désert au pain de Paris, l’arabe au français.


L’intégration par la culture

Dans son œuvre institutionnelle comme poétique, Abdul Amir a toujours cherché l’intégration véritable, celle qui dépasse la simple tolérance.
À travers l’IMA, il veut démontrer que la culture arabe n’a pas à se justifier pour exister en Europe :
elle doit simplement dialoguer d’égal à égal.
Le public français découvre ainsi un monde arabe moderne, créatif et humaniste, tandis que les jeunes arabes en France retrouvent une fierté sans crispation.

Ce n’est plus l’Orient « qui vient s’expliquer », mais l’Orient qui participe.


L’héritage : vers une nouvelle conscience culturelle

Shawqi Abdul Amir n’a pas seulement construit des institutions ; il a bâti des consciences.
Son message est limpide : la culture n’est pas une arme défensive, mais une main tendue.
Dans un monde fracturé par les identités, il incarne la possibilité d’un humanisme partagé,
où l’art, la littérature et la mémoire collective deviennent les véritables diplomates.

À Paris, sa présence à la tête de l’IMA réaffirme ce que la ville des Lumières a toujours su :
que le dialogue n’appauvrit pas, il enrichit.
Et que l’Orient et l’Occident, ensemble, peuvent écrire la même histoire.


Conclusion : l’homme-pont

De la Mésopotamie à la Seine, du désert à la République des Lettres,
le parcours de Shawqi Abdul Amir raconte l’histoire d’un homme qui n’a jamais cessé de traduire :
les langues, les symboles, les âmes.

Poète dans l’esprit, diplomate dans le geste, bâtisseur dans l’action —
il reste l’un des rares à faire cohabiter le rêve et la stratégie.
Et c’est peut-être cela, le vrai message de son œuvre :

le XXIᵉ siècle n’appartiendra ni à l’Orient ni à l’Occident, mais à ceux qui sauront les unir.

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