À Paris, Marcel Khalifé révèle la profondeur secrète du Levant

À Paris, Marcel Khalifé révèle la profondeur secrète du Levant
À Paris, l’oud de Marcel Khalifé retrouve un espace où son langage musical respire librement.

Il y a des artistes dont la présence sur scène raconte bien plus qu’une carrière. Marcel Khalifé fait partie de ceux qui transforment chaque concert en rencontre. Lorsque son oud apparaît dans une salle parisienne, quelque chose de familier s’installe immédiatement, comme si le public retrouvait une voix connue depuis longtemps. Cette relation n’est pas récente : elle s’est construite patiemment, au fil de plusieurs décennies où Paris est devenue l’un des lieux les plus fidèles à son univers.

Quand il arrive pour la première fois dans la capitale française, Khalifé apporte avec lui une manière singulière de concevoir la musique. Son oud ne se contente pas d’évoquer l’héritage du Levant : il en explore les possibilités, l’ouvre à de nouvelles formes, engage un dialogue avec l’écoute européenne. Paris reconnaît très vite cette démarche. Dans une ville habituée aux rencontres artistiques et aux croisements culturels, cette voix venue du Liban trouve un espace naturel.

Les premiers concerts au Théâtre de la Ville, à la Salle Pleyel ou dans d’autres lieux emblématiques dévoilent un artiste profondément enraciné dans son histoire, mais attentif au monde qui l’entoure. Ce public parisien, curieux et exigeant, découvre une musique qui refuse les catégories. Ni purement traditionnelle ni totalement moderne, elle circule entre les deux, portée par un souffle personnel. Ce mélange, à la fois précis et libre, devient l’un des traits distinctifs de Khalifé.

Un autre élément explique la force de son lien avec Paris : la place centrale de la poésie dans son œuvre. En mettant en musique les textes de Mahmoud Darwich, il introduit sur les scènes parisiennes un univers littéraire bouleversant. Ces poèmes, nourris d’exil, de mémoire et de quête de dignité, trouvent un écho particulier dans une ville qui a longtemps accueilli écrivains, penseurs et artistes venus du monde entier. Dans ces instants, la musique et la poésie s’unissent pour créer un climat unique, un silence attentif que seule la grande scène peut produire.

Au fil des années, chaque retour de Khalifé à Paris prolonge ce dialogue. Les collaborations avec des musiciens européens, les projets orchestraux, les créations pour chœur ou ensembles de chambre, tout cela enrichit une relation déjà solide. La capitale n’accueille pas seulement un artiste : elle accompagne un parcours, suit ses évolutions, écoute ses convictions. Et Khalifé, en retour, trouve à Paris une scène où son engagement humain et artistique peut s’exprimer pleinement.

Ce qui frappe le plus aujourd’hui, c’est la diversité du public qui se presse à ses concerts. Des auditeurs venus du Liban, de Syrie, de Palestine ou d’autres régions du monde arabe, mais aussi des Parisiens qui ont découvert sa musique au fil des ans, et une nouvelle génération attirée par une expression artistique qui lie l’intime au collectif. Dans ces salles, toutes ces présences se rassemblent autour d’un même désir : entendre un artiste qui ne sépare jamais la beauté de la vérité.

Marcel Khalifé n’a jamais cherché la démonstration spectaculaire. Sa force réside dans la simplicité assumée de son geste musical, dans cette façon de faire exister une émotion sans chercher à la forcer. Son oud devient alors un instrument qui porte une mémoire, mais aussi une manière d’habiter le présent. C’est cette sincérité qui a fait de Paris l’une de ses scènes les plus fidèles.

Aujourd’hui encore, lorsqu’il remonte sur scène dans la capitale, l’atmosphère qui précède ses concerts a quelque chose de particulier. On y sent une attente calme, presque chaleureuse, comme si chacun venait retrouver un ami lointain. Et lorsque les premières notes résonnent, la salle se transforme en un lieu de partage où les frontières culturelles s’effacent naturellement.

L’histoire entre Marcel Khalifé et Paris n’est pas faite de grands gestes ni de déclarations spectaculaires. Elle repose sur une constance rare : un artiste qui revient, un public qui l’écoute, une ville qui reconnaît dans sa musique une passerelle vers un autre monde. Cette relation, patiemment nourrie, continue d’exister aujourd’hui avec la même force qu’à ses débuts.

À une époque où les échanges culturels sont souvent fragiles, l’itinéraire de Khalifé à Paris rappelle qu’il existe encore des rencontres capables de durer. Sa musique, portée par une fidélité au Levant et une ouverture à l’Europe, incarne cette traversée. Et chaque fois qu’il joue dans la capitale, il donne à entendre ce que peu d’artistes parviennent à offrir : une voix qui relie, tout simplement.

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