Alain Delon, le visage français que l’Orient a aimé et n’a jamais oublié
Dès les années 1960, ses films — Plein Soleil, Rocco et ses frères, Le Samouraï — ont circulé bien au-delà des cinémas européens : au Caire, à Beyrouth, à Damas, à Bagdad, à Téhéran, à Istanbul, les foules découvraient un homme qui semblait à la fois lointain et familier.
Par Ali Al-Hussien – PO4OR, Portail de l’Orient
Un mythe né en Occident, adopté par l’Orient
Il y a des visages qui ne vieillissent pas, des regards qui traversent les frontières et les langues.
Celui d’Alain Delon appartient à cette lignée rare d’icônes qui ont su unir Paris et l’Orient dans une même fascination.
Dès les années 1960, ses films — Plein Soleil, Rocco et ses frères, Le Samouraï — ont circulé bien au-delà des cinémas européens : au Caire, à Beyrouth, à Damas, à Bagdad, à Téhéran, à Istanbul, les foules découvraient un homme qui semblait à la fois lointain et familier.
Le charme français sous le ciel du Levant
Dans les capitales arabes et orientales des années 1960-1970, le nom “Alain Delon” devint synonyme de beauté, de mystère et d’élégance.
Les affiches de ses films ornaient les cinémas du Caire et de Beyrouth ; les magazines libanais et égyptiens publiaient ses portraits avec la ferveur réservée aux stars d’Hollywood.
À Damas et à Bagdad, les jeunes spectateurs voyaient en lui l’incarnation d’un idéal masculin : silencieux, noble, un peu mélancolique comme les héros des poèmes arabes.
Même en Iran et en Turquie, ses films furent reçus comme un souffle moderne, une vision française de la virilité méditerranéenne.
Un regard occidental chargé de nostalgie orientale
Si Delon n’a jamais tourné directement au Moyen-Orient, son cinéma parle au cœur oriental :
la solitude du héros, la fidélité à un code moral, la beauté tragique du silence — autant d’éléments qui rappellent le soufisme, la poésie persane et la mélancolie arabe.
Dans Le Samouraï, son visage impassible évoque l’ascèse du derviche ; dans Monsieur Klein, son errance ressemble à celle de l’homme en quête d’un sens au-delà du visible.
De Paris au Caire : un langage commun de lumière
En Égypte, les cinéphiles de la génération dorée — de Youssef Chahine à Omar Sharif — citaient souvent Delon comme un modèle d’élégance et de retenue.
Au Liban, il fut invité à plusieurs rétrospectives dans les années 1980 ; à Téhéran et Istanbul, son style inspira jusqu’à la mode masculine.
Il était le Français que le monde oriental avait choisi d’aimer : un homme de l’Ouest portant dans ses yeux le mystère de l’Est.
L’amitié d’Omar Sharif : deux miroirs, une mer
Son amitié avec Omar Sharif, l’acteur égyptien cosmopolite, symbolisait ce pont invisible entre deux rives.
Sharif apportait le soleil du Nil ; Delon, la brume de Paris.
Ensemble, ils incarnaient une Méditerranée unie par le cinéma, par l’honneur et par le charme.
Un Orient intérieur
L’Orient de Delon n’était pas géographique : il était spirituel.
Son rapport au temps, à la beauté, à la solitude évoque une sagesse lente, presque orientale.
Dans son silence, on entend le vent du désert ; dans sa fierté, la dignité des anciens.
C’est sans doute pourquoi des millions de spectateurs du Caire à Téhéran ont reconnu en lui quelque chose d’eux-mêmes.
Épilogue : l’éternité d’un regard
Aujourd’hui encore, dans les cafés du Caire ou de Beyrouth, le nom d’Alain Delon réveille une tendresse nostalgique.
Il appartient à cette mémoire partagée où le cinéma devient un langage commun entre Orient et Occident.
Delon n’a pas seulement été un acteur : il fut un symbole celui d’un monde où la beauté, le silence et la lumière parlent la même langue.