Antoine Galland : l’homme qui fit parler l’Orient à la France
C’est à partir de ces rencontres et de ces manuscrits qu’il entreprit, en 1704, de traduire pour la première fois en français le recueil des Mille et Une Nuits. Une entreprise titanesque qui allait bouleverser non seulement la littérature, mais aussi la perception de l’Orient par l’Europe.
Il fut un érudit, un voyageur, un rêveur et un passeur.
Antoine Galland (1646–1715) appartient à cette lignée d’esprits français qui, dès le XVIIe siècle, ont tenté de comprendre et de faire connaître l’Orient à travers la langue, les textes et les symboles.
Mais lui, plus que tout autre, a su offrir à la France un trésor littéraire : Les Mille et Une Nuits.
Né à Rollot, dans la Somme, Galland s’est très tôt passionné pour les langues anciennes et les civilisations lointaines.
Formé au Collège de France, il devint l’un des premiers orientalistes français, traduisant non seulement l’arabe, mais aussi le persan et le turc ottoman.
Ses séjours à Constantinople et à Alep lui ouvrirent les portes d’un monde fascinant : celui des conteurs, des manuscrits parfumés d’encens, des récits oraux transmis de génération en génération.
C’est à partir de ces rencontres et de ces manuscrits qu’il entreprit, en 1704, de traduire pour la première fois en français le recueil des Mille et Une Nuits.
Une entreprise titanesque qui allait bouleverser non seulement la littérature, mais aussi la perception de l’Orient par l’Europe.
Sous sa plume, les aventures de Shéhérazade, d’Aladin et d’Ali Baba se sont métamorphosées en un univers féerique, exotique et profondément humain.
Galland n’était pas un simple traducteur : il était un interprète de cultures.
Il adaptait, reformulait, et parfois réinventait.
Loin d’une traduction littérale, son travail est une recréation poétique qui a permis au lecteur français du Siècle des Lumières d’entrer dans un Orient imaginaire mais bienveillant.
Certains lui reprochèrent d’avoir “adouci” les textes arabes originaux, d’autres le remercièrent d’avoir su les rendre universels.
L’héritage de Galland dépasse aujourd’hui la philologie.
Son œuvre a inspiré les plus grands — de Montesquieu à Hugo, de Goethe à Nerval et a façonné la vision européenne du monde arabe, pour le meilleur et parfois pour le cliché.
Mais qu’importe : grâce à lui, un dialogue s’est ouvert, fragile mais durable, entre deux univers que tout semblait séparer.
Antoine Galland demeure, trois siècles plus tard, un symbole de la curiosité française, de l’ouverture intellectuelle et de la fascination réciproque entre Orient et Occident.
Il n’a pas seulement traduit Les Mille et Une Nuits il a traduit une civilisation à une autre.
Et dans chaque mot de sa plume, dans chaque page de ses nuits, résonne encore aujourd’hui l’écho d’un pont qui ne s’est jamais effondré.
Ali Al-Hussien – Directeur de publication, PO4OR – Portail de l’Orient (Paris)
Illustration de l’article :
(L’image ci-dessous est une reconstitution artistique d’Antoine Galland, à son bureau, entouré de manuscrits arabes et de lampes orientales, dans une atmosphère franco-orientale.)