Ces journalistes et penseurs arabes qui ont conquis les médias français

Ces journalistes et penseurs arabes qui ont conquis les médias français

Dans un paysage médiatique français exigeant et souvent fermé, une génération de journalistes et d’intellectuels venus du monde arabe ou du Proche-Orient s’est imposée avec force et élégance.
Ils ne sont plus seulement des observateurs du “Sud” ou des correspondants régionaux : ils sont désormais acteurs, éditorialistes, analystes et parfois même décideurs dans les grandes institutions de la presse française.
De Ghassan Salamé à Tawfik Mjaied, de Georges Kordahi à Saad Al-Massoudi, ces parcours témoignent d’un mouvement plus profond : celui d’un Orient qui ne se contente plus d’être raconté, mais qui parle lui-même, en français, depuis Paris.

Ghassan Salamé, la pensée arabe dans la République des idées

Professeur, politologue et ancien ministre libanais, Ghassan Salamé incarne la réussite intellectuelle d’un homme venu du Levant et devenu l’une des voix les plus écoutées de la scène académique et médiatique française.
À Sciences Po Paris, il a formé des générations d’étudiants ; à France Inter et France 24, il a su traduire la complexité du Moyen-Orient pour un public occidental avide de clarté.
Tour à tour ministre de la Culture au Liban et représentant spécial du Secrétaire général de l’ONU, Salamé n’a jamais cessé d’écrire pour Le Monde ou Libération, apportant une profondeur rare à la lecture des crises régionales.
Son style analytique, à la fois rigoureux et humaniste, a fait de lui une figure respectée de la pensée franco-arabe contemporaine.

Georges Kordahi, l’élégance orientale à la française

Avant de devenir une star de la télévision arabe, Georges Kordahi a forgé sa réputation en France, notamment à la radio RMC Moyen-Orient – aujourd’hui Monte Carlo Doualiya.
Sa voix chaude, sa diction précise et son ton mesuré ont rapidement conquis les auditeurs français, fascinés par cette manière singulière de “parler de l’Orient depuis Paris”.
Kordahi a su faire découvrir au public européen une autre image du monde arabe : cultivée, apaisée, digne.
Son passage sur les ondes françaises a ouvert la voie à toute une génération de journalistes arabophones qui ont compris que l’on pouvait exercer en France sans renoncer à sa sensibilité orientale.

Tawfik Mjaied, un pont entre deux cultures

Présentateur et analyste franco-tunisien, Tawfik Mjaied est aujourd’hui l’un des visages les plus respectés de France 24.
Sa double compétence linguistique – arabe et française – lui permet d’interpréter l’actualité du Proche-Orient avec une justesse rare.
Mjaied incarne une nouvelle génération de journalistes méditerranéens, capables de penser dans deux langues et de transmettre deux visions du monde sans contradiction.
Son professionnalisme et sa retenue font de lui une référence du journalisme transfrontalier, à la croisée de la Méditerranée.

Saad Al-Massoudi, la rigueur irakienne sur les ondes de Paris

Venu de Bagdad, Saad Al-Massoudi s’est imposé au sein de Monte Carlo Doualiya, filiale du groupe France Médias Monde.
Sa voix familière et ses reportages soignés incarnent le mariage de deux traditions journalistiques : la narration humaniste orientale et la précision éditoriale française.
Al-Massoudi appartient à cette génération d’hommes de presse qui refusent le simplisme et s’efforcent de rendre l’actualité arabe intelligible au public francophone, sans jamais la dénaturer.
En cela, il prolonge la mission initiale de la radio : relier les peuples de la Méditerranée par la parole.

Rachid Arhab, l’autorité tranquille d’un pionnier

Franco-algérien, Rachid Arhab fait partie de ces figures qui ont profondément marqué le paysage audiovisuel français.
Ancien journaliste de France 2, il fut l’un des premiers issus de l’immigration maghrébine à accéder à des postes de responsabilité au sein de la télévision publique.
Nommé membre du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), il a contribué à définir les règles de pluralisme et d’éthique qui régissent aujourd’hui les médias français.
Arhab a toujours revendiqué cette double appartenance qui enrichit sa parole : “Je ne suis pas seulement Français, ni seulement Algérien. Je suis le fruit de deux histoires qui se rencontrent.”

Emmanuel Razavi, l’enquêteur aux racines persanes

Journaliste et écrivain français d’origine iranienne, Emmanuel Razavi s’est illustré par ses grands reportages pour Paris Match et Le Figaro Magazine.
Ses enquêtes sur l’Iran, le Golfe et la géopolitique des religions ont apporté un regard rare, à la fois intime et informé, sur un monde souvent mal compris en Europe.
En fondant Global Geo News, il a voulu renouer avec le journalisme d’investigation indépendant, libre des grandes rédactions parisiennes.
Razavi incarne l’intellectuel hybride : formé à l’école française, nourri d’une mémoire orientale.

Une intégration par l’excellence

Tous partagent un même parcours : celui d’un effort constant pour être jugés non pas sur leurs origines, mais sur leur compétence.
Ils ont franchi les barrières linguistiques, culturelles et parfois politiques pour trouver leur place dans un environnement exigeant.
Loin d’être de simples “voix du Sud”, ils sont devenus des piliers de l’information en France, influençant le regard porté sur le monde arabe et méditerranéen.

Dans les rédactions, leur présence a aussi contribué à une évolution du ton : un journalisme moins ethnocentrique, plus attentif à la complexité des sociétés non occidentales.
Leur double identité n’est plus perçue comme un écart, mais comme une richesse.

Au-delà de l’intégration : la transmission

L’émergence de ces figures a ouvert la voie à une nouvelle génération d’étudiants et de jeunes journalistes arabophones installés en France.
Ils ne rêvent plus seulement de “réussir en Europe” ; ils veulent participer à la redéfinition du regard français sur l’Orient.
Entre Paris, Beyrouth, Tunis ou Bagdad, une même idée les relie : celle d’une presse universelle, où l’origine n’est plus un obstacle mais une couleur dans la palette du monde.

Conclusion

Le succès de ces journalistes venus d’Orient ne relève pas du hasard.
Il traduit la maturité d’une société française capable d’écouter des voix multiples, et celle d’un Orient qui a appris à parler le langage du monde sans perdre son âme.
À travers eux, c’est une nouvelle géographie de la parole qui s’écrit :
celle d’un journalisme franco-oriental, curieux, cultivé et profondément humain —
un journalisme à l’image de PO4OR, pont vivant entre deux civilisations.

Ali Al Hussein PO4OR – Portail de l’Orient
Revue culturelle franco-orientale – Paris 2025

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