Quand Paris devient un décor oriental : les films arabes qui ont choisi la capitale française
Bureau de Paris – PO4OR
Paris exerce depuis longtemps une fascination profonde sur les cinéastes du monde arabe. Ville-monde, lieu de liberté, capitale des arts et de la lumière, elle offre aux réalisateurs un territoire où les identités se révèlent et où les histoires prennent une dimension universelle.
Pour beaucoup d’entre eux, tourner à Paris n’est pas un simple choix esthétique : c’est une manière d’inscrire leurs récits dans une ville qui possède sa propre langue émotionnelle, une ville capable de devenir un personnage à part entière.
Dans les films arabes tournés dans la capitale, Paris apparaît tour à tour comme un refuge, un théâtre de l’exil, un espace d’amour ou une scène intérieure où se rejouent les contradictions du monde contemporain. Elle absorbe les émotions, amplifie les regards et offre aux récits une densité rare.
L’un des exemples les plus marquants de cette rencontre entre cinéma arabe et capitale française demeure le choix de Youssef Chahine d’y tourner des séquences symboliques dans Le Destin. Paris y apparaît comme un écho à la pensée des Lumières, un lieu où s’incarne l’héritage intellectuel qu’il souhaitait défendre. La ville, filmée avec sobriété, devient un prolongement naturel du discours humaniste du réalisateur.
D’autres cinéastes venus du Liban ou de Syrie ont trouvé à Paris un espace pour raconter les trajectoires heurtées de la diaspora. Dans leurs films, les rues de Belleville, les cafés populaires, les marchés cosmopolites ou les bords du canal Saint-Martin composent une cartographie sensible d’une ville habitée par des voix multiples.
Paris y est vibrante, contrastée, parfois mélancolique, toujours profondément humaine.
La capitale joue également un rôle structurant dans certaines productions orientales internationales qui choisissent Paris pour son expertise technique, ses réseaux créatifs et sa tradition d’accueil. Elle devient alors un centre de gravité où les récits liés au Moyen-Orient peuvent s’affirmer et trouver une visibilité mondiale.
Cette dynamique s’étend désormais au cinéma du Golfe, qui explore de nouvelles manières de représenter ses identités en Europe. Plusieurs productions récentes y situent des scènes liées à la mode, à la musique ou à la vie culturelle des diasporas, révélant une génération avide de dialoguer avec le monde à travers les images.
Au cœur de ce mouvement figure également le film « Taw’am Rouhi », production contemporaine qui accorde à Paris un rôle déterminant. Réunissant Aïcha Ben Ahmed, Hassan El Raddad et Amina Khalil, le film met en scène plusieurs séquences tournées dans la capitale française afin de donner à la romance un souffle particulier.
Dans cette œuvre, Paris devient un espace émotionnel : une ville où les sentiments se révèlent à travers la lumière qui glisse sur la Seine, les ponts qui portent les hésitations des personnages, ou les rues silencieuses qui accompagnent les instants de doute et d’abandon.
La capitale française y apparaît non pas comme une carte postale, mais comme un partenaire invisible du récit, une présence qui intensifie la dimension intime du film.
Ainsi, à travers des approches multiples — politiques, sentimentales, existentielles ou esthétiques — Paris occupe une place singulière dans l’imaginaire cinématographique oriental. Elle est un lieu où l’on se confronte à soi-même, où l’on interroge le passé, où l’on réinvente l’avenir. Une ville où les histoires venues du monde arabe trouvent un écho particulier, parce qu’elle porte en elle une mémoire universelle et une promesse d’ouverture.
Paris n’est pas seulement un décor.
Paris est une lumière, une voix, une scène offerte au monde.
Et le cinéma arabe continue d’y trouver un écrin naturel, à la hauteur de ses ambitions et de sa sensibilité.